Musiques traditionnelles en Wallonie
Imep Septembre 2023

Le 26 septembre était organisée à l’Imep à Namur une journée consacrée à la musique traditionnelle en Wallonie.

Après le mot d’accueil du directeur et la présentation de la plateforme numérique avait lieu une conférence de Françoise Lempereur retraçant l’évolution de ce courant musical en Wallonie au fil du temps.
Au terme de son exposé, le micro était alors présenté au public pour quelques réactions et commentaires. Une fois de plus la question de la définition de notre courant musical bien aimé a été posée !

Rejet catégorique de tous du terme « folklorique » celui-ci étant considéré comme recréation visant avant tout la démonstration publique, le spectacle avec des costumes souvent réalisés d’après gravures, une forme de musée…
Le terme « populaire » rejeté également par de nombreux intervenants et par la conférencière elle-même, avis que je ne partage pas du tout, avec lequel je ne peux être d’accord ! Je ne vois pas en quoi « populaire » est à considérer comme péjoratif.

« Populaire », à mon sens, signifie pour le peuple et par le peuple, accessible au plus grand nombre cela implique une participation sans exclusion pas besoin d’avoir suivi des années de stages de danses pour pouvoir participer à un bal « folk » ni d’avoir suivi 10 ans de conservatoire pour pouvoir y jouer. C’est justement cette ouverture qui permet un accès à tous dans une ambiance intergénérationnelle sans exclusions sociale ou culturelle. Attention aussi à un excès d’intellectualisation, qui risquerait d’exclure nombre de personnes désirant simplement pouvoir participer en toute simplicité.

Dans la plupart des publications, articles, CD français on retrouve la mention danse, musique, chants « populaires » le plus souvent de « tradition orale ». Cette mention « populaire » figure depuis toujours sur tous les documents liés aux stages de Massembre ex-Borzée dont on vient de fêter le 40ème anniversaire.

Alors musique traditionnelle ?? Discutable ! La transmission a connu chez nous des coupures de périodes dans le temps avant le « revival » » des années 70, il y avait eu une cassure dans la transition de plusieurs dizaines d’années, les personnes collectées avaient souvent délaissé la pratique depuis longtemps, on ne peut pas considérer que ces personnes ont joué un rôle actif de « transmetteurs » de « maitres » au sens où on le retrouverait dans une forme de compagnonnage comme on en a de nombreux témoignages en Bretagne ou en Auvergne par exemple. Des musiciens de tous horizons ont repris leur répertoire et se sont mis à l’interpréter le plus fidèlement possible et pour d’autres la relecture et le jeu de ce que l’on a retrouvé dans les cahiers des « ménétriers » : Houssa, Lambert, Vandembrile, Jamin…
Alors, musiques « traditionnelles », « de tradition », « populaires » … finalement peu importe le nom que l’on retiendra, l’essentiel est de permettre à un maximum de personnes de participer et d’y prendre plaisir.

Je pense aussi que trop souvent on résume cette musique à une musique de danse, c’est très restrictif ! La chanson a certainement une place aussi importante voire davantage dans nos traditions que la musique de danse. Parfois difficile à diffuser et à perpétuer parce que écrites en wallon, relatives à des faits historiques précis ; chants de luttes sociales par exemple, des chansons aux paroles complètement désuètes…mais cela reste une donne importante de la vie culturelle des générations qui nous ont précédés et cela nous permet également d’en extraire de très jolies mélodies.

Une question a été posée : il y a-t-il un son wallon ? La réponse unanime a été : non ! Je partage ce point de vue et c’est de plus en plus vrai. A l’époque où cette musique était pratiquée en grande partie par des violoneux solos on pouvait peut-être imaginer un son typique de chez nous mais de plus en plus la multiplicité, le mélange d’instruments en a décidé autrement ; accordéons, cornemuses, violons, vielle à roue, épinette, nychelharpa (de plus en plus à la mode) guitare parfois cajon ou djembé …tous des instruments d’origines et d’époques différentes, comment trouver un style régional défini ? Il y a autant de sons différents qu’il n’y a de groupes, et c’est très bien ainsi !

Par contre, je pense qu’il y a eu et il y a peut-être encore un style wallon. La façon de danser la mazurka en est un bel exemple avec ses appuis caractéristiques bien loin de ce qui se pratique habituellement en France et loin de la danse lascive telle que certains l’enseignent et la pratiquent en Flandre.

André Deru

(article paru dans le Canard Folk de décembre 2023)