CF 124 (janvier 1995)

Mais qu'est-ce qui nous fait courir à Borzée ?

Gloubs, dix ans déjà, se sont probablement dit la plupart d'entre nous en recevant le dernier journal de Borzée. Novembre 83, première rencontre et c'était déjà génial. A l'époque, ces retrouvailles répondaient à un besoin.

En effet, après le développement magistral, fin des années 70, des stages de danses et de musiques traditionnelles à Neufchâteau (stages d'été et de week-end à Mirwart notanunent), Rémy Cornerotte et Yvette Schnédérer quittent l'Académie. En guise d'au revoir, ils nous concoctent un super week-end en Gaume où, pour la première fois, la dimension chant est présente avec JeanFrançois Dutertre (septembre 81).

Le soir, c'est la big ambiance alsacienne avec le Folk de la Rue des Dentelles qui hantera Neufchâteau durant quelques années. Puis, à part les stages d'été, plus rien ! Les folkeux sont en manque.

Les rencontres mensuelles du Crousse, qui débutent en novembre 82, comblent quelque peu ce, appelons-le "besoin", mais cela ne vaut pas un week-end. Tiens à propos, c'est à cette première rencontre que j'ai entendu pour la première fois parler du Canard Folk.

Fécondes, ces années !

C'est dire si le premier week-end à Borzée fut accueilli avec enthousiasme. Deux week-ends par an, puis trois et maintenant quatre et un dynamisme qui ne faiblit pas. Nous étions plus de 400 ce dernier week-end. Mais qu'est-ce qui nous fait z'y courir tous autant que nous sommes ?

Une certitude : lorsqu'on y arrive (un peu comme au bout du monde : la route ne va d'ailleurs pas plus loin), on sent que l'atmosphère est différente de ce que nous connaissons dans notre soi-disant "normalité". Le trajet en sens inverse est en général moins plaisant ! Suis-je seule à rêver à une macrosociété semblable à ce micro-climat ?

Bref, le fait de se retrouver entre personnes pour qui les valeurs nature, authenticité, respect, amitié, tolérance sont importantes est un véritable ressourcement. En me remettant dans l'ambiance des week-ends, quelques mots s'imposent à moi et peuvent se résumer en un seul : unité.

Est-ce qu'une partie de ce que nous trouvons dans ce havre de paix serait l'unité ? Unité avec l'environnement, la nature : la protection, le respect de l'environnement et le retour aux sources semblent être un des fers de lance de la politique de l'animation à Borzée.

Unité dans le rassemblement des nationalités (et... régions) : Flamands, Wallons, Bruxellois, Français, Bretons, Luxembourgeois,

Allemands, Anglais, Hollandais y dialoguent avec plaisir.

Unité par l'accueil des familles : non seulement c'est un endroit enfants admis mais on leur propose en sus des activités qui donnent envie de redevenir gosses. Les accompagnants qui ont simplement envie d'être là sont les bienvenus.

Unité enfin dans les disciplines proposées. Pour les stagiaires, le choix est grand : danses, instruments, chants, jeu d'ensemble, travail de la voix, contes, dessin, détente du corps, il y en a pour tous les goûts. La tradition, loin d'être morcelée, y est abordée par de multiples facettes, ce qui permet à chacun de s'y retrouver.

Mine de rien, le bar et le restaurant uniques contribuent à cimenter cette unité et à favoriser les contacts entre les participants. La file d'une demi-heure n'est même pas (toujours) vécue comme une corvée : c'est un haut-lieu de retrouvailles.

Tout cela et bien d'autres choses probablement dont je n'ai pas conscience ou pas le souvenir au moment où je prends la plume, contribue à faire de Borzée ce lieu de ressourcement dont nous avons tous besoin. C'est un endroit où la qualité d'être prend le pas sur l'avoir.

Le dernier week-end a été le point d'orgue de ces dix années et beaucoup ont tenu à être là sans pour autant faire de stage.

Parfait Borzée, sûrement pas. La preuve, c'est que cela s'améliore constamment par le biais d'une consultation populaire permanente et efficace, et grâce au dynamisme de Paul, Michelle, Luc, Andrée et de tous ceux qui travaillent dans l'ombre. A dans dix ans ?

Yvette Fayt.