Cher Canard,
À l’occasion des 25 ans du Folk Festival de Marsinne, l’ASBL Musiques et Traditions m’a confié une carte blanche de 2 heures de danses le samedi soir.
C’est pour moi un cadeau extraordinaire pour lequel je désire profiter de tes colonnes en en y publiant un immense remerciement au comité et aux programmateurs de ce festival dont je suis proche depuis le début.
C’est également pour moi un énorme chantier sur lequel je bosse depuis l’automne, et auquel j’ai convié un gros tas d’amis qui bossent avec moi.
Rassembler le gros tas d’amis ne m’a posé aucun problème. J’ai tant de plaisir à jouer avec tellement de monde que c’est plutôt le problème inverse qui s’est posé : comment faire en sorte quele tas d’amis ne soit pas tellement gros qu’il ne devienne ingérable ?
Qu’il me soit par conséquent permis ici de faire part du déchirement que cela représente pou moi de ne pas avoir repris plein de super-potes dans cet ensemble. Celui-ci ne peut être malheureusement qu’un minuscule échantillon de la foultitude invraisemblable de gens avec qui cela a toujours été, cela est toujours, et cela sera toujours un bonheur de croiser les harmonies au coin d’un banc, d’une table, d’une cuisine, d’une scène, d’un groupe . . .
Pour arriver à constituer mon échantillon-tadami, je l’ai orienté pour tracer l’évolution du pied à travers les âges :
Rassembler des anciens qui se sont dispersés, et avec qui c’était jadis le pied,
Rassembler des nouveaux avec qui je me retrouve pour l’instant à faire danser, et avec lesquels c’est aujourd’hui le pied.
Proposer quelques ateliers transversaux de gens qui ne jouent pas ensemble, et prendre son pied cette année avec ces rencontres improbables autour d’un air à découvrir et travailler en petit comité.
Plutôt que de constituer une grosse fanfare, nous proposerons donc une succession de petites formations. On pourra y retrouver :
Un duo avec Pierre Brasseur:
Pierre est le premier musicien avec qui j’ai réellement construit quelque chose dans la musique. Notre rencontre remontera à 40ans l’année prochaine. Depuis lors Pierre et moi avons toujours pris plaisir à nous retrouver pour quelques notes un soir ou un après-midi durant les vacances ou durant l’année, avec ou sans quelques amis supplémentaires pour étoffer le dialogue. Nous nous sommes aussi retrouvés sans discontinuer dans plusieurs groupes, éteints ou encore actifs(je trouve qu’un groupe de musique, cela fonctionne un peu comme un volcan). Cela vaut donc la peine de prévoir quelque chose à deux.
Amercœur et Rond de Sorcières :
Ces deux formations rassemblent les anciens. Elles ont débuté il ya plus de vingt ans, autour de deux accordéons pour Rond de Sorcières, et autour de cornemuses, vielles et accordéon pour Amercœur. Nous formions une joyeuse bande qui se retrouvait mensuellement lors de bals au château de Fagnolle, près de Couvin.
Amercœur s’est dispersé suite au départ dans le grand Sud des deux cornemuseux, mais voici l’occasion de retrouver tout le monde et taper joyeusement la bourrée comme on le faisait alors.
L’anneau des Sorcières est toujours soudé, et nous ressortirons des airs qui faisaient nos délices il ya longtemps.
210 Boutons pour un anniversaire :
Cette année, il y a 10 ans que Marinette Bonnert et Pere Romani ont formé leur duo à Vienne. À maintes occasions, j’ai retrouvé leurs 21 Boutons en Belgique, en Catalogne, en France et en Autriche. Ils m’ont invité par deux fois à enregistrer avec eux à Barcelone, et chaque fois c’était la fête et les retrouvailles avec les amis.
C’était donc vraiment l’occasion de nous retrouver à Marsinne. Avec quelques imprévus : voir la rubrique « petits ateliers transversaux ». . .
Au Pied Levé :
Voici le groupe des nouveaux. Je suis assez éperdu de pouvoir jouer avec une telle bande de jeunes, mille fois plus talentueux que moi, et aussi mille fois plus loin dans leur instrument et dans la musique, tant pour la composition que pour les arrangements.
C’est une pure jouissance de pouvoir proposer un bout du nouveau répertoire de notre groupe.
Les petits ateliers transversaux :
Étant musicien d’accompagnement, je me suis retrouvé bien des fois en compagnie de gens qui ont des approches de la musique complètement différentes et parfois même diamétralement opposées.
En tant qu’accompagnateur, mon bonheur est de me retrouver cul par dessus tête lors d’une rencontre avec quelque chose d’inattendu. Ou de jamais entendu.
Le pied intégral vient quand je découvre qu’il est possible de résoudre l’équation musicale qui vient de débouler, et enfin quand j’entends ce qui sort.
D’où l’idée de se faire rencontrer en petits groupes des gens qui ne jouent pas souvent – ou jamais – ensemble, autour d’un air ou d’une suite.
D’où l’autre idée également, de présenter l’un ou l’autre musicien avec un instrument avec lequel on ne le connaît pas.
Proposer le fruit de ce travail, cela fait un peu comme une audition de fin d’année dans une académie. Et en septembre, cela a quelques relents d’examen de repassage. . . Toutefois, je trouverais plutôt rigolo d’être recalé dans un examen de musique : l’idée même d’examen de musique est pour moi incongrue. Je me vois plutôt sortir rapidement de la salle d’examen après avoir remis ma feuille blanche, et aller joyeusement bœuffer avec les potes.
Par contre, proposer le fruit d’un tel travail donne immanquablement envie de continuer plus loin l’expérience. L’avenir nous dira ce qui est possible, et nous offrira à coup sûr l’occasion d’en concrétiser l’un ou l’autre bout.
En attendant les issues de cette toute-possibilité, je m’associe à toute la bande pour vous convier à venir ouvrir vos oreilles et vous dégourdir les gambettes le samedi 10 septembre à Marsinne, au festival « Musiques et Traditions ».
En te remerciant encore, Cher Canard, pour l’écho que tu confères à ces propos.
Bien à toi
Michel Jacqmain
Guitariste belge anonyme breveté
(paru dans le Canard Folk de juin 2016)