Il faisait une chaleur étouffante cette année. Le public était un peu moins nombreux, sans doute à cause des fous d’foot qui préfèrent regarder des mecs courir après un ballon, que découvrir des musiciens venus d’un peu partout. Chacun son trip.
Le marché des luthiers était un peu moins fourni, mais c’est toujours l’occasion de dénicher de véritables anches de bombarde en La (pour un répertoire vannetais); Gilles Decock et ses percussions n’étaient pas là, donc l’atelier de cuillers a été annulé. Chouette atelier de podorythmie avec le spécialiste de Réveillons. Il n’a pas de métal sur les semelles comme les danseurs de claquettes, ce sont juste des chaussures en cuir avec petit talon qui frappent sur un carrelage inséré dans un morceau de porte. !
Samedi : découverte d’un trio ukrainien Kyiv Ethno Trio autour d’un collecteur qui est devenu spécialiste de nombreux instruments à vent locaux; accompagné de deux musiciens virtuoses dont un violon à cinq cordes, il produit de superbes polyphonies vocales.
Fru Skagerrak était chouette mais en tous points identique au cd; les trois musiciennes scandinaves furent desservies par la chaleur.
Le groupe québécois Réveillons! venait pour la première fois en Belgique, avec 5 musiciens sur la grande scène, dont le mémorable percussionniste (bodhran et podorythmie), d’une énergie folle et clownesque à l’occasion. Chansons québécoises et humour à volonté font partie du répertoire, avec passage par des harmonies dissonantes comme signe distinctif.
Imar, malgré un excellent cd, fut décevant à mes yeux, mais pas pour les quelques dizaines de danseurs au fond du chapiteau. Voilà un groupe formaté pour les scènes internationales, avec tout ce que cela a de prévisible. Le joueur de bodhran tient son instrument parallèle au bord de la scène et regarde le public en souriant cionstamment. Le joueur de concertina secoue dans tous les sens sa tête ébouriffée. Et bien sûr, dans les suites un morceau de tempo normal cède la place à un reel très rapide : classique, mais une bonne partie du public hurle de joie. Bof et rebof…
Puis samedi soir très tard, Wim Claeys fêtait ses 20 ans de carrière dans la grande tente débarrassée de ses chaises. Las, le gars a décidé de commencer par une ambiance de grosse kermesse. Là aussi, le public s’est divisé. Puis l’atmosphère a évolué, notamment avec l’arrivée de Didier Laloy et Fred Malempré.
Le dimanche, après les habituels chants flamands, on a pu apprécier un joueur d’harmonica anglais incroyablemlent rapide, avec son compère accordéonsite (Will Pound & Eddy Jay), dans un répertoire en bonne partie folk.
Le groupe polonais WoWaKin commence sans crier gare par un chant puissant, des percussions solides, et d’excellents violon et accordéon. Ce dernier joue aussi du violoncelle qu’il tient comme un bébé sur la hanche, avec un archet court. Energie, beau succès amplement justifié, chant féminin attachant et très articulé, et curieux rythmes de mazurka. Nous vous présentons son cd ailleurs dans ce numéro.
C’est à cent lieues des mazurkas de Dronematic, jouées mollement en valse sous la tente du bar. Un habitué se plaint de cette tendance promue, paraît-il, par une grosse organisation de danse dont il tait le nom, mais on a deviné … Cela va de pair, semble-t-il, avec la pauvreté affligeante du répertoire de danses dans certains bals bruxellois. Veut-on vraiment faire croire que les danseurs, même de grand (et jeune) public, n’aiment pas découvrir de nouvelles danses ?
Au même endroit jouait aussi Marco, un groupe de deux jeunes filles sympas, mais qui pensaient un peu naïvement être capables de faire des vocalises scandinaves. Bon, c’est l’intention qui compte …
On est partis le dimanche pendant le concert de l’immense Paddy Keenan (uilleann pipes) avec Frankie Gavin et Dermot Byrne. De la vraie musique sensible et expressive, sans aucun show. Sans doute un des meilleurs événements du festival. On l’avait vu au festival de Lorient il y a une trentaine d’années, en solo dans une petite salle. Il se demandait ce qui lui valait cet honneur, lui qui n’était pas habitué à jouer seul.
A part ça, la vieille gueuze de la brasserie De Cam est toujours aussi délicieuse. Les carbonnades à la gueuze aussi !
Quant à Herman Dewit, il a désormais l’âge de ses artères mais a l’esprit toujours aussi vif malgré l’arrêt définitif de ‘t Kliekske (suite au décès de l’accordéoniste Wilfried Moonen). Il joue en duo avec sa femme Rosita sur des “instruments insolites” (faits d’objets de récup). Pour illustrer ses propos, il sort de son portefeuille un petit rectangle de plastique (du genre qu’on trouve sur les bouteilles d’eau), le porte à ses lèvres et joue toute une mélodie ! Sacré bonhomme …
A l’année prochaine donc, pour un autre Gooikoorts tout aussi sympa !
Marc Bauduin