La pochette intérieure de son nouvel album débute par ceci :
Le chant est comme la rosée du matin, il rafraîchit le sentier du voyageur …
Les groupes de chant est-européen ne sont pas légion en Wallonie. D’autre part, le nom de la chanteuse Monique Gelders a peut-être attiré votre attention ces derniers mois : le stage qu’elle anime à la Dapo Liège a dû être remis plusieurs fois, suite aux mesures de confinement.
Faisons donc connaissance, en commençant par le commencement tel qu’il figure sur le site web:
A l’origine : la rencontre entre Monique Gelders (chanteuse-accordéoniste) et Pascale Trussart (violoniste) en Italie sur le spectacle « Le Bourgeois Gentilhomme » dans lequel l’une était comédienne et l’autre violoniste : une amitié qui donna l’envie de partager des moments en musique … et quoi de mieux que la musique slave et balkanique pour s’envoler !
C’est en 1992 que le duo s’est formé. Il devint un trio lorsque le contrebassiste Alexandre Furnelle leur apporta le son grave et chaleureux de son instrument, en 2001. Leur premier album “Au gré du vent” parut en 2004.
Pour le second album “Couleur Lune” (2015), le percussionniste Stephan Pougin est venu leur donner un coup de main … et est resté. Monique s’est mise à animer des stages de chant en Gaume, dans le Brabant Wallon, à Bruxelles … et a voulu rassembler tous ces chanteurs : c’est le chœur Droga Mleczna, ce qui signifie Voie Lactée en polonais. Pourquoi le polonais ? Mais c’est simplement une des nombreuses langues dans lesquelles le choeur chante …
Droga Mleczna au complet a donné son premier concert en février 2020, juste avant le confinement. Ce fut une belle réussite avec beaucoup de plaisir, mais les concerts suivants ont dû être annulés. Pour ne pas perdre cette belle énergie, ils ont d’abord créé une “chanson confinée” enregistrée chacun chez soi, puis l’idée d’un nouvel album s’est imposée, enregistré l’été dernier, par petits groupes bien sûr.
Maintenant que les concerts sont à nouveau possibles, ce troisième album vient de sortir : “Bons baisers des Balkans”, avec les 33 choristes de Droga Mleczna !
“C’est évidemment un projet (avec autant de monde) un peu surréaliste en cette période, mais c’est en même temps un projet très rassembleur et festif. Et on sent que le public adhère et est gagné par cet enthousiasme”, nous dit Monique.
Et en parallèle, le groupe s’est mis à collaborer avec des artistes d’autres formes d’expression comme la danse, la poésie (avec Tribal Souk), les arts plastiques (Cie Arts Nomades).
Tout cela a pu s’exprimer lors de festivals de musiques tsiganes, de festivals de musiques des Balkans, dans des festivals d’accordéon, de contes, de théâtre forain, des festivals métissés … Et grâce à son répertoire chanté très diversifié (par les pays traversés autant que par les rythmes et ambiances des chansons), O’Tchalaï s’est produit aussi lors de diverses manifestations à caractère socio-culturel (Amnesty entre autres) et a animé fêtes privées, vernissages….
Et, puisqu’on a cité les tsiganes, O’Tchalai chante des chansons tsiganes de différents pays : qu’est-ce qui les différencie ?
Monique nous répond : “Pour les origines tsiganes des chansons : la romnyassa et diri diri so kerdjan sontdes chansons tsiganes de Hongrie. Malyarka , une chanson tsigane russe; Kana me uvonigjum une chanson tsigane de Roumanie. Toujours la même langue (sans doute avec quelques petites variantes suivant les régions). Ce sont les musiques , les harmonies , les rythmes qui se différencient suivant les origines.”
Enfin, O’Tchalaï a voulu plus que jamais communiquer sa passion et organise régulièrement des ateliers et des stages de chants balkaniques et tsiganes tout public.
En voilà une belle palette d’activités ! Et que faut-il comme années de bouteille avant d’arriver à un tel niveau de versatilité ?
En fait, Monique Gelders, dès le départ comédienne, travaille depuis 25 ans avec les Baladins du Miroir et avec d’autres compagnies. La plupart du temps, elle y associe théâtre, chant et musique. Son répertoire pour ces compagnies et pour divers groupes de musique du monde incluent : chants séfarades (avec Klezmamo), manouches, klezmer, le tango argentin (Bruxelles Aires Tango Orchestra), musiques et polyphonies européennes (trio Saltaris) …
Pascale Trussart, elle, a étudié le violon au Conservatoire de Bruxelles avant de se spécialiser en musique baroque. Elle a aussi accompagné de la chanson française, joué pour des vernissages et des spectacles poétiques.
Alexandre Furnelle a une belle réputation principalement avec sa contrebasse mais aussi au chant, avec des instruments primitifs ansi que comme compositeur. Il accompagne le jazz et la chanson, et étudie la viole de gambe (musique ancienne).
Enfin, Stephan Pougin a joué avec de nombreux artistes (Aurelia, Mikis Theodorakis, Panta Rhei …) et a participé à une septantaine d’albums en jazz, en classique, en folk, en bossa nova … avec une inventivité constante.
La curiosité musicale de ces musiciens sous la houlette expérimentée de Monique Gelders les amène à construire dans l’album “Bons baisers des Balkans” une belle mosaïque de sensations très cohérentes. La musique et le chant se font frais et sautillants, lents et profonds, espiègles ou nostalgiques, avec parfois des “diri diri” ou “tik tik tak” qui ne peuvent qu’attirer l’attention. En n’exagérant pas ses sentiments et en menant les choristes avec brio, O’Tchalaï montre sa maturité dans l’utilisation de techniques parfaitement au point.
Enfin, le groupe tient à marquer sa reconnaissance envers Luna Gillet, (studio Sound Respect), l’ingénieur du son qui a enregistré l’album (20 jours d’enregistrement !), mixé et mis sa patte pour donner une belle cohérence à l’ensemble.
contact : www.otchalai.be.
Marc Bauduin
(article paru dans le Canard Folk de juillet 2021)