Diatonicien poitevin assoiffé de découvertes et méticuleux dans son analyse du rythme des danses, Lucas Thébaut fait partie ou a fait partie de nombreux groupes et s’est forgé un style personnel. Quasiment réduit au silence par les mesures anti-covid comme tant d’autres artistes, il a un peu plus de temps à consacrer à des échanges avec des journalistes. Vous vous souvenez peut-être qu’il est venu chez nous animer des bals aux environs de 2015-2017 …
Marc Bauduin
Il joue du diato, a 37 ans et est originaire de Poitiers. Bien que son milieu familial l’ait imprégné de musique et de danse, ce n’est qu’au cours de ses études universitaires qu’il décide de s’y mettre, d’abord par des études en musicologie, puis par l’académie et la participation à de nombreux groupes aux répertoires variés. Une soif de découvertes qui le pousse vers la composition et vers les arrangements de musiques à danser, en se demandant chaque fois quel est le rythme spécifique d’une danse.
C’est que Lucas est également danseur; il danse en s’adaptant à la musiqiue, et joue en s’adaptant aux danseurs. On ne s’étonnera pas de le voir aussi animer des stages et ateliers; les stages de danse portent soit sur le Poitou, soit sur un approfondissement des danses de couples (guidage, cadre …). Passons en revue sa production musicale.
Duo Thébaut : Le pingouin ivre
Avec son père violoniste et guitariste, il sort cet album en 2010. D’une surprenante actualité, il apparaît comme un accordéoniste moderne qui explore les possibilités de son instrument. Le genre accordéoniste français doué qui participe à de multiples duos et autres groupes, comme avec Régis Huiban ou Benoît Guerbigny. Sans complexes déjà à cette époque, il place en début d’album un superbe bal limousine. Un peu plus loin, un rapide “Pas d’été du pingouin ivre”, une suite de maraîchines bien ficelée, et comme 14ème et dernier titre un amusant “sur la route de St Vith” avec une conduite plutôt agitée.
Ballsy Swing : Le paquet libéré
Ballsy Swing a été le groupe principal de Lucas Thébaut, avec Colin Delzant au violoncelle et Valère Passeri au violon, durant pratiquement dix ans. Il a sorti deux cd : “Le paquet libéré” en 2014 et “Le pain quotidien” en 2017, deux albums dont il est encore très content aujourd’hui.
Energie, dissonances, modulations inhabituelles, timbres inattendus sont au rendez-vous, à côté de quelques morceaux plus lents mais tout aussi surprenants. Une introduction standard de bourrée est heureusement là pour nous dire quoi danser. De manière générale, tous ces morceaux restent mélodieux, ce qui n’est pas toujours le cas chez les collègues. Et puis il y a cette pochette avec un Manneken Pis pudique, sans doute imaginée lorsque le groupe est venu à Bruxelles, plusieurs années de suite, animer des bals.
Ballsy Swing : Le pain quotidien
Trois ans plus tard, en 2017, le groupe sort un deuxième album. Au moins aussi mélodieux que le premier, un peu plus sage mais à peine. Avec pour commencer une belle “Scottish à Chloé”, avec un appel pour de la mayo, une valse pour des cachuètes, une belle suite de rondeaux … De la maturité, et un très beau sens de la composition et de l’arrangement.
Et puis il y a Turbobal, le “bal galactique” qui revisite les classiques avec Cécile Delrue-Briot (chant, vielle à roue, violon) dont vous trouverez trois morceaux sur le site de Lucas. Il y a aussi le Gros Trio, nouvelle vitalité pour les danses traditionnelles berrichonnes, avec Cyril Berthet (flûte traversière) et Benoît Roblin (vielle à roue).
Et enfin, outre le bal solo, il y a un groupe prometteur dont un album est en préparation : le Petit Piment, à découvrir dans quelques vidéos “confinées” très chouettes sur le site de Lucas, avec Arnaud Bibonne (boha, chant), Léo Danais (batterie, chant) et Florian Huygebaert (perc.).
Notons encore que Lucas apparaît sur “Accordéons pas pareils” volume 4, un projet de l’UPCP Métive (à Parthenay) destiné à promouvoir les accordéonistes poitevins. Il y joue “Le Sorelline” (à prononcer à l’italienne), objet de recherche musicale avec Zabou Guérin (acc. chromatique).
Infos : lucasthebaut.jimdofree.com.
(article paru dans le Canard Folk de mars 2022)