Au cours des années 70, la RTB, aujourd’hui tant décriée pour son manque d’intérêt envers la musique traditionnelle, a joué un rôle très important dans la promotion de cette musique. Pas uniquement de la musique d’ailleurs, tant il est vrai qu’en matière de tradition la musique, et le chant, sont indissociables de la langue, des fêtes, des coutumes ...
C’est dans le terreau de 1968 avec sa répulsion pour la grande industrie et le recentrage sur les " vraies valeurs " de la fraternité humaine, que le régionalisme se développe. Wallons, qui sommes-nous ? " Textodrome ", " Village d’hier, aujourd’hui " et " Wallodrome " : ces noms d’émissions de la RTB Namur au début des années 70 parlent d’eux-mêmes. C’est Bernard Gillain, avec la complicité très active de Julos Beaucarne, qui réalise ces émissions qui parlent des gens et qui vont à leur rencontre dans les villages, collectant ainsi chansons et poèmes.
Au même moment, à Liège, Françoise Lempereur prépare le premier mémoire universitaire consacré à la chanson traditionnelle wallonne. Quoi de mieux que les ondes offertes par une émission en dialecte pour lancer un appel ? Un quart d'heure par semaine, elle explique une danse (un vieux cramignon par exemple), passe des disques, chante elle-même en s'accompagnant à la guitare et demande aux gens de la province qui connaissent d'autres chansons de lui écrire. Le résultat en 1972 est enthousiasmant avec près de 700 documents sonores récoltés chez les gens.
A Liège également, de 1972 à 1975, Richard Kalisz et Michel Gheude réalisent " Contraste Soir ", une émission très engagée, consacrée essentiellement aux chansons ouvrières et sociales, et qui a aussi organisé des concerts folk à Liège. Françoise Lempereur n’y participe qu’un moment : les vieilles personnes qu’elle souhaite rencontrer ne sont pas des intellectuels d’extrême gauche, elle quitte donc l’émission et s’engage à plein temps dans les émissions wallonnes de Liège.
La télévision, beaucoup plus discrètement, participe au mouvement. Ainsi, un court métrage sur le folklore musical des Hautes Fagnes paraît en 1974 : on y trouve Elisabeth Melchior, Henri Crasson et Mathieu Michel.
En 1973, Bernard Gillain juge que la radio ne suffit plus. Avec Jofroi, Julos Beaucarne et d’autres, il lance le festival de Champs, un rassemblement autour de la culture populaire wallonne. Constant Charneux, Henri Schmitz, les textes de Julos, les groupes folk wallons : durant trois ans jusqu’en 1975, la fête est bien gaie et prend de l’ampleur, mais sans doute moins que ce que Bernard Gillain espérait.
1975 voit un changement de stratégie. D’une part " Wallodrome " est remplacé par " Marie Clap Sabots " qui parcourt les villages à la recherche du folklore musical ; d’autre part Bernard Gillain se radicalise et veut s’adresser aussi aux masses ouvrières dans une fête plus internationale, donc moins wallonne : le Temps des Cerises voit le jour en 1976. En 1979, il a 50.000 visiteurs ... mais guère d’ouvriers.
Pendant ce temps, Françoise Lempereur continue ses enquêtes. En 1978, par un appel à la RTB Liège, sur les chansons enfantines. De 1973 à 1980, sur les Wallons du Wisconsin. Les différentes enquêtes de Françoise Lempereur constituent le matériau des disques de la série " Anthologie du Folklore Wallon " publiée par le CACEF de 1975 à 1981.
En 1982, l’émission Marie Clap Sabots, qui fut longtemps si populaire, ferme ses portes. La mode du folk est passée. Aujourd’hui la RTBF, en quête d’audimat au détriment de sa mission de service public, ne s’intéresse quasiment plus à la musique traditionnelle wallonne.
Dernière mise à jour : juin 2006